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Diego M. & Karim A.

Diego M. & Karim A.

Diego M. & Karim A.
Mis en ligne le jeudi 25 juin 2009.

Publié dans le numéro 30 (mars-avril 2009)

11 février 2009. Je suis avec Diego Maradona, au stade Vélodrome, à Marseille, il entre sur le terrain pendant l’entraînement des joueurs et la foule l’acclame, dans la tribune visiteurs les Argentins sont déchaînés mais dans tout le stade les Marseillais aussi, la Fédération française a distribué quinze mille drapeaux bleu blanc rouge pour organiser le soutien à Domenech et ses joueurs, mais les Français seront sifflés à la fin du match alors que les deux buts argentins seront applaudis par les Marseillais, Maradona salue la tribune argentine puis il retourne dans les vestiaires sans un regard pour les photographes, quelques jours auparavant TF1 a voulu réaliser une interview de lui et son attachée de presse a demandé 100 000 euros, Dieu étant inestimable on peut estimer sa main à 100 000 euros, non seulement TF1 a refusé mais elle a rendu l’information publique, Diego Maradona n’en a rien à faire, depuis son arrêt cardiaque de 2004 il est un peu au-dessus de tout, hier il a reçu la médaille de la ville de Marseille, il a souri mécaniquement en tournant la tête, dans sa conférence de presse il a raconté à nouveau qu’il voulait venir à Marseille en 1989, histoire de flatter les supporters de l’OM, ce soir il va être sage et concentré sur le match, replaçant la défense sans pénétrer sur le terrain en hurlant, c’est seulement son deuxième match en tant que sélectionneur d’Argentine, c’est peut-être sa dernière aventure dans le sport, quel autre avenir a-t-il que d’emmener son équipe gagner la coupe du monde 2010, le reste il a tout connu, il a tout vécu, il est fatigué, il regarde Lionel Messi qui est peut-être encore meilleur que lui à son âge, tout à l’heure il dira « je pense que je peux l’améliorer encore un peu plus », Diego Maradona ne peut pas être jaloux, il n’est jaloux de personne si ce n’est de son propre passé, il mesure 1,67 mètre, il a 48 ans.

12 février 2009. Je suis avec Karim Achoui, sur le plateau du Grand Journal, sur Canal +, il y a une semaine tout juste il est sorti de prison, il raconte ce que lui a dit le directeur de l’établissement lorsqu’il est entré, « certes vous êtes présumé innocent parce que vous avez interjeté appel, mais la vertu de la prison, c’est la punition », Ariane Massenet lui dit qu’une « odeur de soufre » entoure son nom, il répond, très tranquillement, « ça s’appelle un fantasme, madame », il explique qu’il ne « choisit » pas des clients membres du « milieu » puisque ce sont les clients qui choisissent l’avocat, il reste calme en fronçant toujours légèrement les sourcils, les cinquante jours de détention l’ont affaibli il ne peut le cacher, et pourtant il continue à répondre sérieusement, les sept minutes qui lui sont consacrées s’achèvent déjà, évidemment il n’a pas eu le temps de parler de la « Fondation contre les injustices » qu’il va créer pour soutenir les détenus « sans preuves », il pense à Jacques Mesrine, à cette fascination qu’avaient déjà et qu’ont toujours les gens pour le « grand banditisme », et qui évacuent d’un geste tout ce qu’il peut y avoir de politique derrière cela, et le discours sur l’état des prisons, cet état « quasi indescriptible », il pense à la vacuité des films de Richet sur Mesrine, il se souvient avoir lu L’Instinct de mort à douze ans, et qu’il ne l’a jamais oublié, Karim Achoui est au démaquillage, il va aller rejoindre ses amis à Saint-Germain-des-Prés, depuis sa sortie de prison les fêtes s’enchaînent, la vie reprend, son procès en appel est prévu en 2010, il va se battre, il a 41 ans.

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